Stadio Olimpico Rome
Effectivement, les Belges abordent la finale de manière très prudente en abandonnant, du moins pendant le premier quart d’heure, leur défense en ligne. Ils subissent aussitôt l’emprise technique et tactique des Allemands, plus puissants, plus mobiles, décidés, semble-t-il, à faire vite et bien leur ouvrage. Est-ce la perspective d’une prime individuelle de sept mil¬ lions d’anciens francs, assortie d’un bon d’achat d’un autre million dans la bijouterie du choix de madame, qui pousse ainsi chaque Allemand à brûler le gazon de ses crampons ? À la 10e minute, le magnifique Schuster, casque blond au vent, s’enfonce dans la défense belge, propulsé par une passe de Hansi Muller et une accélération de puma. Il alerte Hrubesch sur sa gauche. «Le joueur le plus grand, le plus lourd, le plus laid d’Europe, l’un des plus efficaces aussi», selon Gérard Ernault, attend le rebond de la balle et la frappe aussitôt, avec le bonheur de la voir toucher le sol devant le nez de Jean-Marie Pfaff, Tarzan pour une fois trahi par sa liane. L’avantage pris par les Allemands laisse planer la perspective d’un match à sens unique. Si Hansi Muller, démarqué par Rummenigge à vingt mètres de Pfaff (28e) ne canonnaitpas au- dessus de la transversale, c’en serait fait des Belges ou tout comme ! Au lieu de ça, les Allemands font un gros gâchis d’occasions, seigneurs au-dessus de ces bagatelles, jusqu’à la mi-temps. Ils s’offrent ainsi aux méchancetés de la «sorcière aux dents vertes», si redoutée des cyclistes. Briegel, le beau Briegel au visage de chevalier teutonique, qui court le cent mètres en dix secondes huit dizièmes, saute 7,48 m en longueur et 1,87 m en hauteur ; qui est aussi brillant dans la neutralisation d’un adversaire (Cools en l'occurrence) que dans les montées balle au pied; Briegel donc est blessé à une cheville, et rem¬ placé par Cullmann. Ce qui entraîne un affaiblissement du milieu de terrain dans le même temps que Schuster traîne un peu la patte, lui aussi.
Pfaff a encore détourné en manchette une tête de Rummenigge (50e). Mais les Belges réagissent, retrouvent leurs jambes et leurs automatismes. On les voit monter comme le lait dans la casserole, bouillonnants, inexorables. Tout nous parait possible. À eux aussi. À la 72e minute, Van Der Elst grille toute la défense allemande et s’envole vers Schumacher. Stielike revient à deux mètres derrière le Belge et lui applique le traitement de choc que nécessite son cas. La faute, contraire à l’esprit du jeu, condamnable donc, a été commise un bon mètre devant la surface mais l’arbitre M. Rai- nea, pas meilleur que ses copains, indique le point de penalty à la grande joie de Van Der Eycken. 1-1, et sale temps pour les Allemands. Car les Belges sont papillons et eux terrestres aux jambes lourdes, fatigués d’avoir tant papillonné. À la 88e minute, à l’approche de la prolongation et peut-être d’une deuxième finale à jouer vingt-quatre heures plus tard, Rummenigge tire un coup franc de la gauche. La balle arrive, aérienne, tendue, que s’apprête à saisir Pfaff lorsqu’une girafe au long cou, Hrubesch bien sûr, coupe la trajectoire et d’une tête irrésistible, loge le ballon dans les filets. C’est une victoire à l’allemande, une victoire de Hrubesch surtout, auteur de deux buts et sacré d’un seul coup grande vedette du football européen. Jupp Derwall a les larmes aux yeux. Un peu plus loin, Hansi Muller, Schuster, Karl-Heinz Fôrster, Rummenigge, tous les jeunes en somme, annoncent sans complexe leurs intentions: «Nous serons beaucoup plus forts en 1982. » On se demande bien pourquoi on ne les croirait pas.
Merci!
ReplyDeletesuper, merci beaucoup
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