L’A. S. Roma vit des jours exaltants depuis près d’un an et découvre un royaume qu’elle ne soupçonnait pas. Songez qu’en quatre-vingt cinq ans de calcio, elle n’avait été championne qu’une seule fois et encore en 1942, à une époque où l’on avait plutôt tendance à scruter le ciel pour éviter les météorites guerrières qu’à comptabiliser les pignes entre Lombards et Ro mains. D’ailleurs, cette équipe romaine de 1 942, c’est bien simple, elle avait les faveurs du Duce et elle ne gagnait que seize de ses trente matches. Sans Amadeo Amadei elle n’eut été que poussière. Le scudetto de 1983 a une autre saveur. Il a été conquis de haute lutte sur la Juventus de Turin, celle de Platini et Boniek. Il récompense des efforts, des investissements et un style défini peu à peu par le sorcier suédois Nils Liedholm. Il ouvre une ère nouvelle, pas celle de Benito le Romagnol, mais celle d’un football plus pimpant que le catenaccio traditionnel. L’A. S. Roma 1983-1984 n’est pas une équipe de bras cassés. Elle compte en son sein deux authentiques champions du monde, Bruno Conti le feu-follet de l’aile et Francesco Graziani, le buteur venu de la Fiorentina après huit saisons passées à Torino. Elle s’appuye sur bien d’autres forces : celles de trois internationaux A italiens supplémentaires - Ancelotti, Maldera, Pruzzo - celle d’un remarquable capitaine romain, Di Bartolomei et surtout celles de deux joueurs de la grande équipe du Brésil 1982, Paulo Roberto Falcao et Antonio Carlos Cerezo. Cerezo est tout neuf dans le calcio, arrivé par la dernière vague étrangère de l’été en compagnie de Zico (Udinese), Coeck (Inter), Laudrup (Juventus, prêté à la Lazio), Gerets et Blissett (Milan A.C.).
Falcao lui, en est à sa quatrième saison sous les couleurs des giallorosso et il a participé comme chef de file à la conquête du scudetto. A vrai dire, il est devenu le véritable roi de Rome, bien vivant celui-là, tout à fait épanoui dans le jeu à la Liedholm qui privilégie la zone, la réflexion et l’intelligence. Falcao est un artiste, un merveilleux joueur de balle dont l’Internacional de Porto Alegre a fait ses délices pendant quinze ans. Il a réalisé une Coupe du Monde 1982 éblouissante avec le Brésil et sombré dans le désespoir quand la squadra azzurra eut fracassé le beau jouet de Santana. Mais ses deux buts contre l’Ecosse et l’Italie en Espagne, la démonstration faite à tous sur la scène mondiale que son talent est exceptionnel, l'ont dynamisé. Falcao a moins de problèmes psychologiques qu’auparavant, il assume mieux les rigueurs de la compétition italienne, il a trouvé la communication avec les gens de la cité éternelle. Accessoirement, Falcao est le joueur le mieux payé d’Italie et sans doute, depuis la retraite des monstres Pelé et Beckenbauer, l’un des mieux payés du monde. Le renouvellement de son contrat avec l’A.S. Roma, en juillet- août 1983, a donné lieu au plus incroyable steeple-chase, à la plus irritante discussion de marchands de tapis qu’on ait jamais vus et entendus. Falcao, libre au terme de trois années, champion d’Italie de surcroît, avait des propositions de l’inter, de Milan A.C., de Naples et d’ailleurs. Son président, M. Viola, élu sénateur, désirait à la fois garder son Brésilien et sauvegarder certains principes. L’un n’allait pas avec l’autre. Il lui fallut plier. C’est ainsi que, pour la seule saison 1983-1984, Paulo Roberto Falcao obtint un contrat de base de 630 millions de centimes, soit 52,5 par mois. Derrière lui, dans la hiérarchie financière et malgré un genou que ressemblait de plus en plus à un tshimpumpu (melon d’eau en zaïrois), le Hollandais de Naples, Rudi Krol, était étiqueté à 480 millions de centimes : ce financier d’élite avait fait rédiger son contrat en dollars ! La Coupe d’Europe embrase Rome et la perspective de la gagner - puisque la finale aura lieu au Stadio Olimpico - déchaîne les enthousiasmes. Les joueurs eux-mêmes fixent l’objectif prioritaire de leur saison : ils réussiront là où ceux de la Juventus ont échoué.
Liedholm dut remanier tout son sys tème défensif et pas mal de sa charnière médiane : Nela, l’arrière-droit de vingt ans fut associé à Righetti en défense centrale, Emilio Oddi venant de Vérone pour prendre le numéro 2 à Rome et Aldo Maldera, trente ans, demi d’origine, gardant son poste d’arrière gauche. Au milieu, l’arrivée de Cerezo nécessita un certain rodage mais le trio Falco-Cerezo-Di Bartolomei ne pouvait pas être le plus mauvais de la péninsule, ni techniquement, ni tactiquement. Et l’attaque Conti-Pruzzo-Graziani n’était non plus dénuée de rien. Mais la défense, signor Liedholm ? « La mise en place de notre nouveau dispositif a forcément pris un peu de temps, répond le technicien romain quand on le gratte sur le sujet. Ensuite, quand on prend le risque, dans un pays comme l’Italie, de rompre avec la tradition et d’oser davantage, on se prive inversement des maillons nécessaires à une défense intransigeante. Mais on assume son choix. »
Dundee Roma
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En demi-finale, l’A.S. Roma affronte Dundee United dont la flamme, la vitesse et la force de percussion qui animent son équipe. Le match-aller ayant lieu à Tannadice Park, les Romains savent au moins ce qui les attend. Sans Falcao qui a dû renoncer au dernier moment, l’équipe de Liedholm fait tout le jeu en première mi-temps, faisant courir la balle et la propulsant même sur la barre transversale écossaise (tir de Graziani). Elle a peut-être le tort de croire, à la mi-temps (0-0), qu’elle a fait le plus difficile et maté son adversaire. Mater des Ecossais, chez eux ! Quelle idée ! Trois minutes après la reprise, une lame de fond déferle sur la défense romaine, Sturrock se sert de sa main pour remettre le ballon dans la bonne direction et Dodds conclut avec la bénédiction de l’arbitre est-allemand M. Kirschen.
Douze minutes encore (60e) et l’affaire prend des proportions beaucoup plus inquiétantes pour les Romains car Stark porte le score à 2-0 dans une ambiance propre à réveiller les morts du cimetière voisin. L’intelligence tactique n’a plus cours contre le débit d’un torrent. Le troisième but écossais est au bout du soulier, le Romain rame contre le vent à coups de pelles et de semelles et, sur son banc, Jim McLean profère des insanités.
Jim McLean est le manager de Dundee United. Poils d’argent coupés ras sur une gueule de commando, il ne s'adoucit que quand il parle à son chien et à condition qu’il soit déférent. McLean, pour tout dire, a assez mauvaise réputation : son fichier disciplinaire à la Fédération écossaise ressemble à un annuaire téléphonique. McLean donc insulte les joueurs romains les traitant, par exemple, de « bâtards d’Italiens », ce qui ne veut pas dire grand chose mais n’harmonise guère les rapports. La presse italienne enfle les propos du grossier et contribue, McLean le lui reprochera assez, à faire du match-retour une revanche plus aiguisée qu’elle ne l’aurait été en temps normal.
Roma Dundee
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25 avril 1984
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A Rome, les Ecossais de Dundee United ne savent pas profiter des circonstances qui jouent deux fois en leur faveur. L’arbitre français M. Vautrot commence par refuser un but de Conti à cause d’une faute préalable. Puis Ralph Milne, sur un centre de la gauche d’Eamonn Bannon, se retrouve seul à sept mètres de la cage de Tancredi d’où il expédie une fusée vers la lune. Ce crime envers le jeu, les Ecossais ne tardent pas à le payer. A la 21e minute, Conti tire un corner sur lequel le ballon est manqué par tous les défensseurs écossais mais pas par la tête de Pruzzo. L’A.S. Roma ne fait pas preuve d’un gros talent collectif en ce 25 avril 1984. Graziani joue sur ses rails, ballon vissé dans le pare-chocs de la locomotive ; Conti taille des boutonnières dans le cuir écossais ; Falcao dessine des fleurs pour son plaisir et, de temps à autre, tire un beau plan d’architecture, mais tout cela ne fait pas une tapisserie d’Aubusson. Grâce divine, Pruzzo existe. Un quart d’heure après son premier but (36e), un ballon descend du ciel, manqué par Richard Gough. L’avant-centre romain se le rabat de l’épaule et montre à McAlpine un exemplaire de l’art latin. 2-0 avant la mi-temps, l’ardoise de Tannadice Park effacée, on va enfin pouvoir causer.
On aimerait une révolte écossaise, de la fu reur et des grands cris. Jim McLean et ses boys ont trop chaud sous le soleil romain, ils pensent plutôt à un bon bain. Les giallorossi, programmés pour le succès (70 000 francs de prime chacun pour une recette de sept millions), poursuivent donc dans la voie tracée. Neuf minutes après la reprise (54e), Pruzzo manque une reprise de volée à six mètres. Quelques instants plus tard (57e), une superbe passe de Cerezo démarque Pruzzo devant McAlpine. Le montagnard écossais n’hésite pas longtemps : goûte- moi donc cette chicorée sauvage, dit-il à son copain romain, en lui enfonçant le nez dans le tapis vert. Penalty, montre M. Vautrot. Dans ce coin-ci, s’extasie Di Bartolomei. Trois à zéro pour la Roma, c’est Byzance au Colisée mais aussi trente-trois minutes encore à souffrir sous la menace d’un but écossais qui chargerait tout, le sens de la qualification et la couleur du temps. Un tir de Milne est bloqué par Tancredi en deux fois deux mains. Un autre, de Sturrock est dégagé en corner. Quand l’arbitre siffle la fin du match, six joueurs romains (ni Falcao, ni Pruzzo) se précipitent vers Jim McLean et lui font une conduite dite d’honneur pas tout à fait honorable.
Rome baigne dans un jus sucré mais les statisticiens soulignent un fait troublant : dans ce match contre Dundee United, l’équipe romaine n’a tiré que cinq fois au but, inscrivant il est vrai cinq buts dont deux refusés par l’arbitre. Le verre était-il à moitié plein ou à moitié vide ?
In the match itself, a nervous United were simply overwhelmed, well beaten 3-0, although they weren't helped by the French referee, Michel Vautrot, who seemed to have the same distaste for physical contact as Amélie Poulain's father. It later emerged that Roma had tried to bribe Vautrot, a crime for which the showers-that-be banned them from European football for only a year.
Thank you! Do you have the first game in Dundee?
ReplyDeleteMerci beaucoup
ReplyDeleteFORZA ROMA
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ReplyDeleteOnce a cheat....always a cheat.
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