Thursday, January 25, 2024

Copa Libertadores 1987 Peñarol América

Finale Retour
28 Octobre 1987
Centenario Montevideo


  En remportant la 28e édition de la Copa Libertadores le 31 octo-Ibre dernier, à Santiago du Chili, le club uruguayen Penarol Montevideo ne s'est pas seulement octroyé le droit de disputer la finale intercontinentale de Tokyo. Il a aussi inscrit pour la cinquième fois son nom au palmarès de cette épreuve (60. 6l. 66. 82. 87), la plus prestigieuse du continent sud-américain au niveau des clubs. Ce qui le place à deux victoires à peine du fabuleux record détenu par Independiente (Argentine). Il a encore permis à l'Uruguay, petite nation de trois millions d'habitants dont les deux seules fiertés sont les plages de Punta del Este et le football, de « boucler » une saison 87 exceptionnelle. Car cette victoire en « Libertadores » s'ajoute à celle, acquise en juillet à Buenos Aires par la sélection nationale, dans la « Copa America ». Et ce à l'heure où le football uruguayen, économiquement vacillant, pillé de ses plus remarquables joyaux. (Paz. Francescoli, Alzamendi. Gutierez. Saralegui, Da Silva, Batista, Ramos. etc.) paraissait moribond. 

 Mais, au-delà de tous ces aspects, au delà également des questions que ce succès soulève sur l'état du football sud-américain, notamment sur le plan du jeu, Penarol, en remportant cette compétition, a écrit un chapitre véritablement épique de son histoire et de celle de la « Copa Libertadores ». L'un de ceux dont on reparlera encore dans vingt ans, voire dans cinquante, quand Aguirre, le buteur miracle de cette équipe, aura autant de cheveux blancs que les vagues du rio de la Plata ont de crêtes argentées. Cela mérite un retour en arrière... Avec deux qualifiés pour chacun des dix pays de la Confédération sud américaine, la « Copa Libertadores » accueille chaque année vingt clubs répartis lors du premier tour en cinq groupes de quatre. Le premier de ces cinq groupes est qualifié pour les demi-finales, disputées dans deux poules de trois (le tenant du titre entrant à ce stade de l'épreuve). Penarol, lors du premier tour, se vit confronté à deux clubs péruviens (Alianza Lima et Cole-gio San Augustin) et un uruguayen (Progresse). Il se qualifia aisément, totalisant dix points sur douze possibles, avec quatre victoires, deux matches nuls, dix buts pour et quatre contre. Une formalité. 

 En demi-finale, la tâche proposée était autrement plus difficile : River Plate, tenant du titre et Independiente. détenteur du record de victoires dans l'épreuve, étaient au menu. Ce match tripartite du Rio de la Plata devait s'avérer très serré. Penarol surprenait tout le monde. Il ne prenait qu'un point sur quatre contre River, mais quatre sur quatre contre Independiente. battu à Montevideo 3-0 mais surtout à Avellaneda (banlieue de Buenos Aires) 4-2 ! River n'ayant pu glaner qu'un seul point contre Independiente, Penarol sortait vainqueur d'une poule où il semblait voué à la dernière place. C'était la première surprise. Ça n'allait pas être la dernière. Pendant que Penarol en décousait avec les grands d'Argentine. America Cali (Colombie) se qualifiait pour la finale d'extrême justesse. Au premier tour, il se débarrassait de deux clubs boliviens (The Strongest et Oriente Petrolco) et surtout des frères ennemis du Depor-tivo Cali grâce à un match de barrage (les deux équipes terminaient à égalité parfaite dans le groupe, huit points, treize buts pour et six contre). Match remporté aux penalties (4-2) après 0-0. Ouf! En demi-finale. America devançait Barcelona (Equateur) et Cobreloa. Là encore, de justesse face à ce dernier (un but de plus !). 

 La finale Penarol- America pouvait commencer. Pour America Cali, c'était la troisième consécutive, après celles perdues en 85 (contre Argentine Juniors) et 86 (contre River Plate). Pour Penarol, c'était le retour au sommet après la dernière victoire en 82 et la finale perdue de 1983 (contre Gremio de Porto Alegre). Les arguments de Penarol : une équipe jeune, enthousiaste, terriblement volontaire, dans la grande tradition de la « garra » uruguayenne. Une formation au jeu peu académique, où l'engagement physique prédomine. Les arguments d'America Cali : une formation riche en talents, avec deux Argentins, le gardien Falcioni et l'avant-centre international Gareca. deux Paraguayens, le virevoletant ailier droit Battaglia et le brillant milieu de terrain Cabanas. et un Uruguayen. Santin. Mais aussi l'ancien international colombien Willington Ortiz, ailier gauche toujours insaisissable malgré ses 36 ans. Une équipe technique et dotée de grandes capacités créatrices, mais souvent bridée (et brimée) par les consignes « réalistes » de son entraîneur, le «docteur» Ochoa Uribe. apôtre inconditionnel des défenses renforcées et du jeu en contre. Le match aller à Cali ne devait pas offrir un grand spectacle. America s'imposait 2-0 (Battaglia et Cabanas). sans toutefois démontrer dans le jeu une réelle supériorité. Le règlement de la « Copa Libertadores » étant ainsi fait qu'il faut au moins prendre trois points sur quatre pour s'imposer, l'enjeu du match retour était simple : une nouvelle victoire ou un match nul d'America à Montevideo lui offriraient la « Copa » : une victoire de Penarol lui ouvrirait les portes d'un match d'appui. 

 À Montevideo, dans un stade archicomble, coloré des couleurs jaune et noir des locaux, dans une ambiance survoltée. America débutait de la meilleure des manières : un but de Roberto Cabanas d'une magnifique tête dans la lucarne du gardien Eduardo Pereyra dès la 19e minute. Silence de morgue dans le stade. America, dès lors, allait commettre la grossière erreur de ne plus songer qu'à protéger son but. L'équipe colombienne, pourtant exceptionnellement dotée pour construire, s'employait uniquement à détruire. Et à résister aux assauts désordonnés mais constants de Penarol. Après une heure de jeu, l'avant-centre Aguirre égalisait de la tête sur corner. 1-1. America était encore gagnant. Les Colombiens, arc-boules sur leur but, tenaient, tenaient, tenaient encore et toujours à trois petites minutes de la fin. Jusqu'à cette fatidique 87= minute : coup franc, à vingt mètres face au but. Le jeune Villar, entré peu avant, pose le ballon, recule, le « Centenario » retient son souffle. Ballon piqué du pied gauche : lucarne ! Un pays entier explose de joie. « Penarol, Penarol, Penarol, Penarol es un milagro » s'égosillent les radioreporters. Oui, Penarol est un miracle. Il a gagné le droit de jouer le match d'appui. Avec sa rage de vaincre, avec sa furia. Et grâce aux conceptions hautement bétonnantes d'Ochoa Uribe. Commentaire de Cabanas le lendemain matin à l'aéroport : « Nous avons renoncé au football. Mais que peut-on faire si ce n'est obéir aux consignes ?... »

Penarol gagna le match d'appui 1-0 et méritai ce succès. Faute de faire honneur aux plus belles vertus du jeu, technique, intelligence, création, il a au moins entrepris, ce qu'America Cali. où plutôt | son entraîneur Ochoa Uribe a refusé ! de faire. L'équipe que le Japon découvrira le 13 décembre à Tokyo est un ensemble très jeune : à peine 22 ans de moyenne d'âge. Sa principale force réside en un état d'esprit formidablement volontaire. Mais cette Copa Li-bertadores aura aussi révélé le talent ! de quelques joueurs dont on reparlera sans doute bientôt. En premier lieu celui du buteur Diego Aguirre, qui a marqué la plupart des buts importants de l'épreuve : contre Indépendante et lors des deux dernières rencontres de la finale. Aguirre, qui n'a que 22 ans. et joue à Penarol depuis un an et demi (il jouait avant à Liverpool Montevideo), est le prototype du centre-avant opportuniste et plein de sang-froid (plus de 40 buts cette année). Toujours en attaque, les ailiers Daniel I Vidal (à droite) et Jorge Cabrera (à I gauche) sont très dynamiques. Au milieu du terrain. José Perdomo (défen-sif) et Ricardo Viera (relayeur) sont d'infatigables tacleurs-relanceurs. Eduardo Da Silva, lui. est le stratège de l'équipe, un joueur technique et clairvoyant, qui a cependant souvent bien du mal à canaliser l'ardeur de ses partenaires. En défense, José Herrera, Ob-dulio Trasante, Marcelo Roui et Al-fonso Dominguez sont ce qu'il est convenu d'appeler des joueurs solides : la précision de la relance n'est cependant pas leur point fort. Les principaux remplaçants sont le milieu Matosas (moins créatif que Da Silva) et l'attaquant Villar. Celui-là même qui marqua le coup franc de l'espoir à Montevideo en finale, grâce à un magnifique pied gauche. Le gardien Eduardo Pereyra enfin, n'est autre que celui de la séiection nationale, sélection au sein de laquelle l'accompagnaient lors de la copa America Perdomo, Trasante et Matosas. L'élégance, l'imagination et la technique ne sont pas les caractéristiques principales de cette équipe. Mais quand l'adversaire refuse le jeu, la fougue suffit parfois. L'entraîneur de ce Penarol d'énergie et de sueur. Oscar Washington Tabarez (40 ans), ancien défenseur qui exerça en Uruguay et au Mexique, puis devint entraîneur de la sélection en 83 avant de passer à Da-nubio, Wanderers et enfin Penarol (en 87), avoue d'ailleurs : « Les joueurs de Penarol sont imprégnés d'une motivation quasiment historique qui les pousse à se transcender. C'est ainsi que notre club a forgé sa gloire. C'est ainsi que nous continuons à gagner. C'est l'énergie d'un petit pays habitué à l'adversité dans tous les domaines et qui est fier de concurrencer les grands en football ».

C'est encore ainsi que Penarol, trente-huit fois champion d'Uruguay, essayera de vaincre à Tokyo contre Porto. Pour une quatrième Coupe Intercontinentale après celles remportées en 61 (contre Benfica). 66 (contre le Real Madrid) et 82 (contre Aston Villa). Le voyage au Japon lui a d'ores et déjà rapporté une victoire : économique. Penarol. en effet, gagnera pour l'occasion quelques grosses poignées de dollars et profitera sans doute du déplacement pour rentabiliser son titre de « campeon » (d'Amérique au moins et peut-être du monde) avec des mat-ches amicaux en Asie ou ailleurs. Ce qui contribuera sans doute à combler un peu le déficit énorme (1250000 dollars, soit plus de 7,5 millions de francs) qui est le sien. Et qui a décidé la justice à décréter la saisie de toutes ses recettes aux guichets ! Cela n'empêchera pas. sans doute, les recruteurs du monde entier de « piller » une fois encore ses rangs. A Montevideo, on s'attend déjà à ce que la moite de l'équipe émigré à court terme. Mais cela ne fait plus peur : derrière les jeunes Jaune et Noir de 87, il y en aura d'autres, demain ou après-demain pour perpétuer la légende des miracles de Penarol. Et de ce football uruguayen qui demeure un véritable mystère, pour sa capacité à révéler depuis toujours quantité de grands joueurs alors que le pays, avec ses trois millions d'habitants à peine, est en quelque sorte à l'Amérique du Sud ce que l'Albanie (en terme de population tout au moins) est à l'Europe. Rien n'étant parfait en ce monde, on regrettera cependant que cette « production » de talents ne s'accompagne que trop rarement d'une idée directrice favorable à un football esthétique intéressant. Comme l'écrivait fort justement notre confrère Juan de Biase, du quotidien argentin Clarin, au lendemain du succès de Penarol à Santiago, cette finale Libertadqres nous a impitoyablement offert l'image d'un football sud-américain où « l'on court toujours plus et plus vite mais où l'on joue de moins en moins, et où il manque toujours plus du football ». C'était déjà le constat que nous dressions cet été à l'issue d'une Copa America où le « réalisme » avait triomphé. On peut toujours espérer qu'à Tokyo, dans quelques jours. Penarol s'efforcera de nous offrir une autre image. Quitte à ne pas être fidèle à sa propre légende. Ou à entreprendre d'en écrire une autre.

Peñarol: E. Pereira, J. Herrera, Rotti (J. Gonçálvez), Trasante, A. Domínguez, J. Perdomo,
E. Da Silva, D. Vidal, R. Viera, J. Cabrera (Villar), D. Aguirre.
América: Falcioni, H. Valencia, V. Espinosa, Aponte, Porras, Luna, Santín, R. Cabañas,
W. Ortiz (H.D. Herrera), Gareca, Battaglia.

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