Lorsque Everton gagnait son billet pour la finale de la Coupe des Coupes en étouffant le Bayern Munich, Andy Gray, le numéro 9, avait lancé: «Ce qui compte en priorité pour nous, c'est moins une coupe d'Europe qu'un titre de champion, et par-là, d'être meilleur que Liverpool. J'ai de bons copains chez les «Reds» tels Kenny Dalglish ou John Wark que je retrouve en équipe d'Écosse, mais lorsqu'on est face à face, on ne se connaît pas». Ce qui importe en Angleterre, c'est la première place, reconnue et enviée, dans le Royaume-Uni. Et pour être uni pour le meilleur dans ce royaume, Everton a donné carte blanche a l'un de ses anciens serviteurs, Howard Kendall. En place depuis mai 1981, Kendall connaît bien Everton. Ancien milieu de terrain de l'équipe, il a été l'un des artisans dans la dernière conquête du titre national en 1970. Son équipe, il la soumet d'entrée à un régime de Spartiate, fondé sur la rigueur, la solidarité, la confiance, et la détermination, sans bouleverser au fil des saisons les lignes de force qui la composent. Patiemment, il donne à son équipe un style et des ambitions. Et, après une septième place en championnat, la saison 1984 couronna ce minutieux travail par une facile victoire en finale de la «Cup» sur Watford (2-0). «C'est certainement depuis ce jour que mes joueurs ont acquis cette envergure potentielle pour changer de dimension», dira plus tard Kendall. L'avenir allait le confirmer.
DEMIE FINALE
EVERTON BAYERN
24 avril 1985
Goodison Park
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3.1 Go
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Dès l'ouverture du championnat 1984/85, Everton montrait un nouveau visage, manifestement façonné par les saisons passées. Les «Blues» s’installaient aux avant-postes en championnat et le premier déclic se produisit un soir d'octobre, sur le territoire de leurs aïeuls, Anfield Road, où il s'imposaient 1-0. Une victoire historique. Il n'y a que l'espace du Stanley Park entre les deux clubs, mais Everton avait parcouru déjà un long chemin. Les «Blues» levaient la tête alors que les «Reds» baissaient du nez. «Attendez avant de vous exclamer, une saison ne repose pas sur un exploit», s'était empressé de minimiser Kendall. Il n'empêche que la régularité dans la victoire conférait peu à peu à Everton la réputation de terreur qui appartenait à son voisin de palier, champion en titre, qui connaissait pour sa part une terrible baisse de régime. Le jeu d'Everton repose avant tout sur une époustouflante condition physique, un axiome qui règne d'ailleurs sur tout le football britannique. Fort d'un effectif de 29 joueurs venant tous d'horizons différents, Everton tournait en fait sur un noyau de 20 combattants, doués d'une habileté technique, d'un sens tactique, et d'une cohésion que la pression grandissante ne parvenait pas à perturber. Au mois de mars, alors que les hommes de Kendall caracolaient en tête □u championnat, cinq joueurs avaient connu le bonheur d'une sélection nationale: les Gallois Neville Southall (gardien) et Kevin Ratcliffe (capitaine et défenseur central), l'Anglais Trevor Steven (milieu de terrain), l'Irlandais Kevin Sheedy (milieu de terrain), et l'Écossais Andy Gray (attaquant). Deux mois plus tard, seul Derek Mountfield attendait une première consécration... L'équipe, c'est avant tout un rideau de fer défensif. Pour preuve, les «Blues» ont concédé leur premier but en Coupe d'Europe lors du match retour de demi- finale contre les Munichois (3-1).
Mountfield et Ratcliffe récupèrent tout ce qui traîne sur le gazon et dans les airs, et le premier nommé n'hésite pas à épauler ses attaquants (12 buts cette saison). Les arrières latéraux, Gary Stevens et Pat Van Den Hauwe, sont reconnus pour leur vélocité et se retrouvent fréquemment ailiers. Habile des pieds, Stevens n'est pas maladroit non plus des mains, et ses remises en touche sont d'authentiques corners qui ont notamment causé deux des trois buts d'Everton contre le Bayern Munich. Van Den Hauwe, 23 ans, est un sujet d'exception dans tous les sens. Déniché à la fin de la saison 1983 par Kendall, alors qu'il se morfondait à Birmingham, relégué en division 2, Van Den Hauwe a proprement explosé depuis. D'origine belge, il s'est exilé en Angleterre pour éviter des tracas avec le gouvernement de son pays après avoir refusé d'effectuer ses obligations militaires. Et après bien des démarches administratives, il a finalement obtenu la nationalité... gal¬ loise, quelques jours avant de disputer son premier match international comptant pour les éliminatoires de la Coupe du Monde contre l'Espagne, le 30 avril dernier (3-0). Tout cela après une bagarre de chiffonniers entre les deux sélectionneurs nationaux anglais et gallois, respectivement Bobby Robson et Mike England, pour s'attacher ses services.
Le milieu de terrain demeure peut- être son point fort avec quatre hommes infatigables et d’une cohésion on ne peut plus efficace. Le plus remarqué de la bande a été Peter Reid, élu par ses pairs du football anglais comme le meilleur joueur de l'année. A 29 ans, Reid prend ainsi sa revanche sur un passé particulièrement malheureux, des blessures successives l'ayant privé sans nul doute d'une carrière autrement plus embellie. Bobby Robson l'a bien compris en enrôlant pour la première fois dans l'équipe nationale le régulateur et stratège des «Blues».
Avec lui, avec Trevor Steven le récupérateur à l'image de Tigana, avec Kevin Sheedy, l'artiste de la maison et spécialiste des coups francs, avec Paul Brace- well, qui tire de sa jeunesse un surprenant sang-froid, le milieu de terrain d'Everton affiche une complémentarité presque parfaite. Reste l'attaque avec les Écossais Graeme Sharp, deuxième meilleur buteur de la saison avec 30 buts, et Andy Gray, dont la robustesse et l'abnégation pèsent constamment sur la défense adverse, et qui n'est jamais aussi transcendé que lorsque les tribunes sont combles. Le tout représente une force irrésistible et inépuisable qui n'est cependant pas de la même veine que celle de Liverpool. A la différence des «Reds» au fonds de jeu continental jalousement préservé en dépit du flux des joueurs, Everton repose sur des vertus typiquement «made in England». Une équipe de bûcherons qui se soucie peu de savoir de quel côté l'arbre va s'abattre, pourvu qu'il tombe. Mais la mise en route de cette machine à vaincre ne s'est toutefois pas effectuée sans quelques toussotements en début de saison. Sur les trois tableaux qui font faire d'Everton un futur grand d'Europe, les résultats ne sont pas encore révélateurs. Ainsi à l'automne, en Coupe des Coupes, les hommes de Kendall peinent pour passer le premier tour devant la modeste équipe irlandaise de l'Université de Dublin (0-0, 1-0). En championnat, jusqu'à leur succès historique à Anfield Road, les «Toffees», autre surnom des joueurs d'Everton, accumulent les victoires, mais face à des équipes qui n'ont pas la trempe de Liverpool. Les premiers signes de son étonnante vitalité apparaissent quelques semaines plus tard, en Tchécoslovaquie, où Everton s'impose (1-0) en match aller du deuxième tour de la Coupe des Coupes face à l'inter Bratislava. Le match retour (victoire par 3-0) l'autorise à passer l'hiver au chaud. D'autant plus chaud que l'équipe atteint sa vitesse de croisière dans toutes les compétitions, au point qu'elle vire en tête en championnat devant les traditionnels gros tonnages. En fait, si Everton domine déjà ses sujets en championnat, la «Cup» va être matière à de plus gros soucis. Déjà. Après un cinquième tour sans suspense face à une équipe de ligue régionale, Telford (3-0), Everton souffre mille morts pour se débarrasser au tour suivant d'Ipswich, ayant recours pour cela à un match à rejouer le 13 mars (2-2, puis 1-0), le penalty inscrit par Sharp étant, en outre, sujet à caution.
Ses retrouvailles avec l'Europe, les 6 et 20 mars en quarts de finale, se sont an revanche bien passées puisque le club néerlandais du Fortuna Sittard s'écroule par deux fois sous la terrible pression de son adversaire (3-0 à Goodison Park, 2-0 aux Pays-Bas). La «Cup» étant toujours une réalité, le championnat devenant au fil des matches sa propre affaire, et l'Europe lui faisant toujours les yeux doux, les contours d'un impossible triplé se dessinent imperceptiblement. Le véritable premier point de référence de la valeur d'Everton se situe le 10 avril, sur le stade olympique du Bayern Munich, encerclé par 78 000 spectateurs, en match aller des demi-finales de la Coupe des Coupes. Regroupé autour de son gardien Neville Southall, auteur probablement de son meilleur match de la saison, mais n'hésitant pas non plus à tenter sa chance, Everton arrache un 0-0 évocateur. 14 jours plus tard, la force indescriptible des Anglais, mêlée de détermination et même de hargne, fait exploser les Allemands qui pouvaient pourtant croire en leur étoile jusqu'à la mi-temps avec un but signé Hoeness. Mais trois buts de Sharp, Gray, et Steven propulsaient les «Blues» vers la première finale européenne de leur histoire.
Le Bayern qui à l'époque courait lui aussi après les trois mêmes trophées Coupe d'Europe, Coupe de RFA, Championnat redescendait sur terre. Mais les Allemands maudissaient l'intense démonstration de force d'Everton. «C'est probablement la meilleure équipe d'Europe du moment, mais certains, comme Gray, accompliraient une brillante carrière en rugby», grinçait Hoeness. Entre-temps, les «rugbymen» en question avaient été tenus sous pression. Une demi-finale de Coupe d'Angleterre les attendait le 13 avril. L'adversaire d'en face, Luton, n'est pas vraiment au mieux de sa forme et s'inquiète plus de sauver sa peau en championnat. Ce qui ne l'empêche pas de mener au score sur une superbe volée de Rickie Hill (36e). L'incroyable se poursuit jusqu'à la 85e minute, avant qu'un coup franc de Sheedy n'évite à Everton une douloureuse élimination. Et la prolongation donnera raison au favori qui sauve sa tête grâce à celle de Mountfield à 6 minutes de la fin. Une fois encore, la Coupe avait donné bien des frayeurs à son propre propriétaire. La cadence est désormais de plus en plus infernale. Les points décisifs succèdent aux matches importants et l'on attend d'une rencontre à l'autre le sacre d'Everton alors que ses dauphins s'engluent dans des contre-performances. C'est finalement le jour de la Pentecôte, le 6 mai, qu'Everton est mathématiquement assuré de sa couronne. Deux buts contre Queen's Park Rangers fond de Goodison Park le nouveau lieu sacré du ballon rond. «Voilà une bonne chose de faite. Depuis le temps qu'on nous rebattait les oreilles avec ce titre qui, disait-on, ne pouvait pas nous échapper, nous sommes enfin récompensés. Je dirai même soulagés. Bien sûr, ce n'est pas le moment de flancher. Ce n'est pas tous les ans qu'on peut réussir une telle saison.» Howard Kendall se voulait rassuré et rassurant. Everton avait conquis un titre, mais deux restaient à prendre. Un exploit dont aucune équipe européenne ne peut s'enorgueillir. Et Everton avait quatre jours pour réussir.
La folle semaine d'Everton, du 12 au 18 mai, avait pour premier rendez-vous Rotterdam, le 15, en finale de la Coupe des Coupes. Pour son 41e match européen, celui qui n'avait jamais dépassé les quarts de finale d'une coupe continentale a tout pour lui. Une équipe au complet cela a été le cas pendant pratiquement toute la saison un moral inébranlable, une cote d'ultra favori. Le Rapid Vienne, son adversaire, en est conscient. Avec un milieu de terrain décimé (absence de Brucic, Panenka diminué), les Autrichiens font preuve d'une incroyable maladresse et, cantonnés en défense, laissent toute l'initiative du jeu aux Anglais. Et c'est avec bonheur que rien n'est marqué après 45 minutes. Mais le Rapid continue à n'y voir que du bleu et se révèle impul¬ sant à résister plus longtemps devant ce rouleau compresseur qui aplatit ses espoirs avec trois buts de Gray (57e), Steven (72e), et Sheedy (86e), le sursaut autrichien (but de Krankl à la 85e minute) n'étant qu'un dernier spasme. Everton, lui, continue à vivre à pleins poumons. Ses troupes, pourtant sur tous les fronts et sans cesse mobilisées, demeurent solides aux postes, et son rêve n'a plus qu'un match à surpasser, la finale de la «Cup», pour se concrétiser. Face à cette fabuleuse passe de trois, tous les clubs, aussi prestigieux et gourmands soient-ils, s'y sont cassé les dents. Par deux fois, en 1972 et 1973, Leeds s'en est approché, mais s'est finalement effondré dans la dernière ligne droite. Pareille désillusion pour Liverpool en 1977 qui, après s'être adjugé le championnat, a laissé la coupe à... Manchester United, avant de remporter sa première Coupe des Champions.
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