Le Stade de Reims d'Albert Batteux

 

L'équipe du Stade de Reims brille encore au début des années 1960 après le retour de son prodige Raymond Kopa. Dans la mémoire collective,Reims demeure le club qui, pendant une décennie, a illuminé le football français avec des joueurs comme Muller, Fontaine, Kopa, Piantoni et Vincent

. Bien sûr, il ne fallait pas une grande imagination, mais le journaliste avait au moins un joli sens de l'observation. En effet, dans les années 1950, apparut dans la presse sportive une belle expression : « le football champagne ». Ces mots surgirent dans un compte rendu d'un match du Stade de Reims. Soudain, on découvrait qu'une équipe de club, en France, pouvait pratiquer un jeu pétillant, enthousiaste, entièrement placé sous le signe de l'élégance, du mouvement, de la fluidité. Dans cette région de Champagne-Ardenne, les négociants en boisson à bulles ont toujours été des hommes de décision on a même dit de pouvoir. Il est donc normal qu'au début du siècle (en 1911, exactement), la Société du parc Pommery (propriété du marquis de Polignac) ait créé le Stade de Reims première version. Les mesquins ajoutent : « Ce fut une création pour divertir les ouvriers du marquis. » Et c'est cette équipe qui participa au championnat professionnel de France de deuxième division entre 1935 et 1939. Pourtant, en septembre 1938, pour des raisons financières, ce Stade de Reims ne peut faire autrement que de fusionner avec un autre club de la ville, le Sporting Club de Reims. Dans ce mariage, le premier apporte son nom, le second ses couleurs, rouge et blanc, et trois de ses dirigeants, MM. Canard, Germain et Hiltgen. Très vite, les deux premiers vont prendre la direction du nouveau club, mais la guerre ralentit la marche en avant : de 1940 à 1944, le club doit se contenter de participer au Championnat de France (zone Nord) et avec des joueurs comme Vandooren, Favre, Perpère, Petitfils. A la sortie de la Seconde Guerre mon¬ diale, le football reprend pleinement ses droits dans la capitale champenoise, et les victoires arrivent : titre de champion de France en 1949, Coupe de France en 1950. MM. Canard et Germain, dirigeants avisés et dotés d'un sens de l'anticipation exceptionnel.

À ses heures de gloire, dans les décennies 1950- 1960, le Stade de Reims a brillé de mille feux. Mais dans la mémoire collective et dans la galerie des stars, un joueur domine tous ses équipiers, son président, son entraîneur : Raymond Kopa. Né le 1 3 octobre 1931 à Nœux-les-Mines, il y découvre le football avant de rejoindre Angers pour apprendre le métier d'électricien. Il est transféré à Reims en 1 95 1 . Dès lors, il va briller en blanc et rouge, dans ce club où il a été pris en affection par l'entraîneur d'alors, Albert Batteux. Très vite, il devient le maître du « jeu à la rémoise », synonyme d'élégance, d'inventivité et d'efficacité. Les points forts de ce joueur d'exception : un dribble irrésistible, une vision périphérique et instantanée du jeu. Avec Reims, il remporte deux premiers titres de champion de France (1953 et 1955) et participe à la finale de la Coupe d'Europe des clubs champions (1956) contre le Real Madrid, qui va l'accueillir pendant trois saisons (trois Coupes d'Europe, deux titres de champion d'Espagne). En 1 958, il prend part à la Coupe du monde en Suède avec l'équipe de France, qui se classe troisième. Kopa est désigné comme le meilleur joueur de la compétition, y est surnommé par la presse mondiale le Napoléon du football et reçoit en fin d'année le Ballon d'or qui honore le meilleur joueur européen. En 1 959, il revient au Stade de Reims, avec qui il va encore remporter deux fois le Championnat de France (1960 et 1962). 

très aigu, ont mis en place, avec l'aide du directeur sportif Pierre Perchat, un système nouveau dans le football  français : la politique des jeunes. Ainsi, le club a recruté les meilleurs jeunes joueurs d'Ile-de-France et des Ardennes : le public découvre très vite Marche, Jonquet, Penverne, Flamion ; il vient en nombre au stade Auguste-Delaune, et les matches contre le Racing Club de Paris constituent des temps forts du Championnat de France. Et puis, dans cette équipe du carrefour des années 1940-1950, évolue un attaquant brillant, Albert Batteux. C'est lui qui, en 1 950, au soir de la finale de la Coupe de France remportée face au Racing Club de France, de¬ vient l'entraîneur de l'équipe, en accord avec son prédécesseur Henri Roessler. C'est le début de l'âge d'or du Stade de Reims. Batteux a décidé d'illuminer le jeu de son équipe. Il est l'adepte d'un football d'élégance et d'efficacité son modèle ultime est la sélection nationale de Hongrie qui a pratiqué un football de perfection entre 1952 et 1955. Mieux, Batteux est aidé, dans sa quête, par un joueur d'exception, Raymond Kopa, arrivé à Reims en 1951. Dès lors, le Stade de Reims fera rêver la France du football : titres nationaux, Coupe de France, et surtout deux finales de la Coupe d'Europe des champions contre le Real Madrid. Reims est alors un grand d'Europe, tout comme l'équipe espagnole, les Italiens de Florence ou du Milan AC, le Benfica Lisbonne. La belle histoire va pourtant s'achever en 1 963 : après une élimi¬ nation en Coupe d'Europe, Albert Batteux quitte le club. C'est le début d'une lente mais inexorable chute dans l'ordinaire du football français. A l'aube du XXIe siècle, le Stade de Reims est une banale équipe de troisième division. Pourtant, dans la mé¬ moire collective, ce club a écrit à jamais quelques-unes des plus belles pages du sport français. 

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